arnaud

La disparition de Richard Taylor

posté le 23 June 2007 à 00:47
Ca faisait très longtemps que je n'avais pas été scotchée par un roman comme ça !

Je viens de finir La disparition de Richard Taylor, d'Arnaud Cathrine.



Malgré le titre et la couverture qui ferait penser à un Fred Vargas, ce livre n'est pas un roman policier.

Richard Taylor, trentenaire, londonien, disparait un jour, sans prévenir personne, laissant derrière lui femme et bébé.
Que peut on faire quand on n'a plus goût à rien ? Où peut-on aller quand on fuit sa vie ?
C'est ce qu'on découvre par bribes, au travers des témoignages d'une dizaine de femmes qui ont croisé plus ou moins longuement la vie de Richard Taylor, avant ou après sa disparition. Toutes ces femmes parlent à la première personne, chacune dans son style. La femme délaissée qui n'a rien vu venir ; la mère de Richard Taylor, qui prend le départ de son fils comme une trahison ; son ancienne collègue de travail ; la voisine ; la tenancière transexuelle d'un bar gay ; une auteur de théâtre en manque de reconnaissance... c'est à travers des morceaux de la vie de chacune de ces femmes qu'on suit la trace de Richard Taylor, que l'on obtient des bribes de réponses sur ses motivations...

L'histoire découpée en chapitres, chacun dédié à une femme ; le changement de ton d'un chapitre à l'autre... tout cela donne un dynamisme certain à la narration.
Un certain sens du suspense quand même ; un sentiment étrange de voyeurisme à observer Richard Taylor par le prisme de la vie des autres... tout cela fait que j'ai été accro à ce livre, que j'avais beaucoup de mal à le poser.
Car si Richard Taylor est le personnage central de l'histoire, il n'est finalement qu'un prétexte. Un prétexte pour découvrir ses femmes qui nous livrent dans leurs monologues le plus intime de leurs vies. Des vies pas toujours très reluisantes. On s'attache à elles ; certaines reviennent à plusieurs reprises, d'ailleurs.

Arnaud Cathrine, l'auteur est un français d'une trentaine d'année. A-t-il jeté dans ce roman ses propres fantasmes, comme pour les exorciser ? Je ne le sais pas, et je n'ai même pas trop envie de me poser ce genre de question. En tout cas, il a de très bonnes références musicales, puisqu'au détour d'un chapitre, on croisera Sufjan Stevens, Elliott Smith, Jeff Buckley...



Pour finir, je vous recopie deux extraits, juste pour vous laisser entrevoir le style d'écriture :

Sarah Kane parle :

(...) et le métro est arrivé, je crois que je ne m'étais jamais sentie aussi triste, je me suis levée, j'ai hissé ma crasse et mon haleine fétide, je l'ai vue hésiter entre deux wagons, j'ai décidé que je choisirais le wagon qu'elle n'aurait pas choisi, elle n'a pas prêté attention à ma présence dans son dos, elle était en retard cette fille comme tout le monde, en retard pour se rendre à son boulot, elle cherchait le bon wagon, celui où elle pourrait trouver une place assise, elle a hésité entre deux, j'ai décidé que je monterais dans celui où elle ne serait pas, elle a avisé les voyageurs qui débarquaient des deux wagons qu'elle avait mis en balance, elle a choisi le wagon de gauche dans lequel on pouvait, à vue de nez, facilement trouver une place assise, j'ai donc décidé de monter dans l'autre.
Elle s'est engouffrée dans le wagon de gauche, je l'ai suivie et je me suis assise en face d'elle.
.


Deuxième extrait, beaucoup plus court.

Susan Taylor parle :

Que se passe-t-il.
Il ne se passe rien.
Il y a juste que je tiens bon.
Alors ça me prend tout mon temps.
.