Régression.

posté le 05 March 2006 à 12:33

"IL FAUT COMMENCER PAR APPRENDRE À CROIRE AUX PETITS MENSONGES.
- Et alors on peut croire aux gros ?
- OUI. LA JUSTICE. LA PITIÉ. LE DEVOIR. CES CHOSES-LÀ.
- Ça n'a rien à voir !
- TU CROIS ? ALORS PRENDS L'UNIVERS, RÉDUIS-LE EN POUDRE TRÈS FINE, PASSE CETTE POUDRE AU TAMIS LE PLUS SERRÉ ET ENSUITE MONTRE-MOI UN SEUL ATOME DE JUSTICE, UNE SEULE MOLÉCULE DE PITIÉ. ET POURTANT ..." La Mort agita la main. "ET POURTANT LES HOMMES AGISSENT COMME S'IL EXISTAIT UN ORDRE IDÉAL DANS LE MONDE, COMME S'IL EXISTAIT DANS L'UNIVERS UN ... UN ÉTALON DU BIEN À L'AUNE DUQUEL ON POURRAIT LE JUGER.
- Oui, mais ils sont obligés de croire ça, sinon à quoi bon ...
- C'EST BIEN CE QUE JE DIS."

Terry Pratchett, Le Père Porcher, p.376, L'Atalante, 2003





Quand on est jeune, on ne comprend pas vraiment ce qu'est la réalité. On pense que ses rêves pourront devenir vrais, on se croit exceptionnel. On pense que le monde, après tout, ce n'est jamais qu'une sorte d'histoire ; qu'en fait, il a été créé pour nous, qu'on en est l'unique raison d'être. On ne doute pas.
Et puis on grandit, et puis on s'aperçoit que ce n'est pas vrai. Que nulle part, dans l'univers, les mots "rêve", "justice" et "amour" ne sont prévus dans le script. Ça fait mal, de perdre ses certitudes. Un coup bas, en plein dans les illusions.
En fait, on ne comprend pas plus que quand on était enfant, on est toujours aussi naïf ; mais on perd toute spontanéité. Peu à peu, on devient des atrophiés de l'imagination. Imaginer, à quoi bon ? Ça sert à quoi ?
On se transforme en machines, dénuées d'espoir. On sait faire des choses, oui ; on a appris, étudié, vécu ; on sait. Suffisamment pour perdre foi en ce qu'on croyait avant, en tout cas.
Le problème, c'est qu'une machine ne devrait pas pouvoir se souvenir. Se rappeler qu'avant, ce n'était pas comme ça. Une machine avec une mémoire, un être sans espoir qui sait confusément qu'auparavant, il en avait. Peter Banning privé de ses ailes, et qui s'en rend compte.

Une machine ne devrait pas savoir ce qu'elle était, imaginer ce qu'elle aurait pu être. À quoi bon ?

"IL N'Y A PAS DE JUSTICE. IL N'Y A QUE MOI."


Commentaires

ariankh a dit :
posté le 05 March 2006 à 12:52
Je suis ptet encore trop jeune et idéaliste, mais "Que nulle part, dans l'univers, les mots "rêve" [...] et "amour" ne sont prévus dans le script." je suis pas d'accord.

Kuro a dit :
posté le 05 March 2006 à 13:17
Elle vient d'où la deuxième citation ? du bouquin Blade Runner ?

Ceacy a dit :
posté le 05 March 2006 à 13:19
Non, de Terry Pratchett, toujours - mais elle est présente dans plusieurs des tomes. Toutes les répliques en majuscules sont de la Mort.

Canard-WC a dit :
posté le 05 March 2006 à 17:06
Tiens tiens j'ai rien à lire, un Pratchett en particulier ?

Ceacy a dit :
posté le 05 March 2006 à 17:32
Hmmm... Mortimer est un des premiers où la Mort acquiert de l'importance en tant que personnage (le premier où il (oui, il) est le héros). Tu peux le lire, si tu souhaites le voir en action :)

Canard-WC a dit :
posté le 05 March 2006 à 19:44
Oh bondieu ça a l'air cool, mille merci mon brave.

st-geranium a dit :
posté le 05 March 2006 à 19:52
Mais en toute honnêteté. C'est quand même loin d'être le meilleur. Moi, je te conseillerai plutôt "Au guet !" qui
1/ Fait partie des meilleurs pratchett.
2/ Lance de nouveaux héros. Et donc, peut se lire sans avoir lu d'autre livres du disque-monde avant.

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Lecteur, avant toute chose, je me dois de t'avertir du contenu de cet encart. Je ne vais pas m'y étendre sur ce que je suis ou ne suis pas. Non pas pour ne pas t'ennuyer, c'est le cadet de mes soucis pour le moment, et puis ça arrivera tôt ou tard ; mais pour ne pas trop en dévoiler. Ce blog est le mien, et en tant que tel m'est dédié de long en large : me dépeindre — ou tenter de le faire — en quelques mots serait, plus qu'une erreur, un mauvais calcul. Et je déteste faire de mauvais calculs, ça me frustre.

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